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Discours de politique générale • septembre 2023

Monsieur le Président, chers collègues,

 

Au nom du groupe de gauche et écologiste, je ne peux entamer mon propos sans avoir une pensée pour nos frères marocains et libyens qui subissent d'importants désastres naturels depuis deux semaines.

 

Ces malheurs frappent des États dont les structures sont peu capables de protéger efficacement leur population face à ces événements tragiques.

 

Qui plus est, la politique de développement et de partenariat international française et européenne envers les rives sud de la Méditerranée doit véritablement être questionnée, étant donné les difficultés diplomatiques et humanitaires que la France et l'Europe éprouvent pour à la fois mener la solidarité internationale et gérer des flux migratoires catastrophiques au sens humain du terme. J’en profite aussi pour relayer l’inquiétude de familles de militaires morbihannais bloqués au Niger (cf. article journal Ouest-France).

 

Depuis le début de notre mandat, lors de plusieurs sessions, nous avons évoqué ce type de tragédie qui se multiplie à travers le monde. Souvent, nous avons demandé que le département fasse preuve de solidarité, et il faut le reconnaître, vous y avez répondu. Nous pensons à l'arrivée de réfugiés ukrainiens, au tremblement de terre en Turquie, ou encore à notre demande d'adhésion au Réseau de Coopération Décentralisée pour la Palestine (même si, pour ce dernier, nous avons hâte d'en voir la mise en œuvre).

 

Nous pouvons constater que le retour de conflits armés et le dérèglement climatique génèrent du chaos, et malheureusement, nous n'en sommes qu'au début. Il nous semblerait utile que le conseil départemental se dote, comme il l'a fait par le passé, d'une politique de coopération décentralisée. Nous vous proposons d'y réfléchir à travers un groupe de travail où l'opposition que nous sommes serait représentée. Cette commission aurait également pour mission de proposer des actions plus ponctuelles lorsque des drames ont lieu, comme ceux cités précédemment.

 

Nous avons lu dans la presse que vous étiez interrogé sur le nombre de mandats que vous aviez en cours, sur ceux auxquels vous décidiez de renoncer, sur votre questionnement entre le choix de la politique et celui du sport.

Je ne suis pas conseiller en orientation et je me garderai donc de vous donner des conseils en la matière. Ce qui nous importe au sein de notre groupe, c'est que vos engagements annexes ne nuisent pas à la capacité de notre collectivité et que le département soit, en temps et en heure, aux côtés des Morbihannaises et des Morbihannais qui en ont besoin.

Cependant, nous ne pouvons que constater, sur un ensemble de sujets que les élus de notre groupe ont pu suivre ou faire remonter, que la réactivité et l'efficacité ne sont pas toujours au rendez-vous dans un certain nombre de cas.

 

 

Quelques exemples :

C'est le cas d'une femme du Pays de Lorient qui vit avec sa fille handicapée et vit dans un habitat insalubre. 6 mois après nos premiers échanges et notre signalement, elle s'apprête à passer un nouvel hiver sans chauffage dans cette même maison.

C'est le dossier du FSL : entre notre première interpellation et le fait que vous considériez que ce sujet devait être retravaillé, il s'est écoulé 12 mois sans qu'au moment où nous parlons, aucun changement n'ait eu lieu. Même pas un coup de pouce transitoire pour faire face à l'inflation galopante des prix de l'énergie. Ce sont des familles étranglées, parfois obligées de quitter leurs logements pendant ce laps de temps.

Ce sont les délais d'attente à la MDA qui ne s'améliorent pas malgré les promesses du début de mandat d'un délai de réponse devant rapidement être sous les 4 mois. Aujourd'hui, nous sommes quasiment au même délai moyen de traitement qu'au début du mandat (5,62 mois - Août 2023, contre 6 mois - Juillet 2021).

 

Il y a quelques mois, nous vous indiquions que sous le précédent mandat, votre majorité avait entre 2015 et 2021, selon le bilan social de notre collectivité, fait disparaître 60 postes d'assistants socio-éducatifs (assistants sociaux, éducateurs spécialisés, Conseiller en économie sociale et familiale). Vous nous aviez répondu que le Département mettrait des moyens où il y en aurait besoin.

 

Aujourd'hui, nous vous le disons, sur un ensemble de politiques publiques qui sont au cœur des compétences de notre collectivité les constats ne sont pas bons, il faut mettre plus de moyens pour répondre aux besoins, il faut des élus présents pour faire avancer les sujets dont nos concitoyens ont besoin.

 

 

Quelques mots sur la situation sociale dans notre département. L'inflation et la crise énergétique affectent très fortement le pouvoir d'achat des ménages les moins riches. Nous le voyons sur le terrain, la pauvreté et la précarité s'aggravent pour les personnes éloignées de l'emploi y compris pour une partie des personnes qui travaillent.

 

Ces personnes trouvent parfois des solutions à travers un réseau de structures caritatives qui fournissent notamment de l'aide alimentaire. Je vais rappeler ici à quel point cette question affecte bon nombre de nos concitoyens. Dans un sondage IFOP en date du 10 avril de cette année, auprès de 1007 Français vivant au SMIC ou en dessous de ce revenu, 53% disent avoir réduit les portions alimentaires et 42% indiquent avoir même supprimé un repas par jour au vu de cette inflation.

 

Ces structures font donc face à des demandes qui explosent, au point de les mettre elles-mêmes en difficulté. On a tous en tête le cas des Restaurants du Cœur. Il y a urgence à mieux aider ces associations qui aident très concrètement des familles, des femmes, des enfants à manger un peu mieux à leur faim. Alors on vous redit ici ce qui a été dit dans le huis clos de la commission permanente, nous ne comprenons pas les faibles revalorisations voire les stagnations des aides à ces structures.

 

Par exemple, l'association des Restaurants du Cœur (9000€) et la Croix Rouge Française (21 500€) n'ont pas eu de réévaluation de leur aide en 2023.

 

Nous ne demandons pas que l'ensemble des aides du département suive parfaitement l'inflation, mais concernant ce type d'associations, cela devrait pouvoir être le cas. Elles répondent à des besoins vitaux et ne pas faire évoluer les aides dans ce contexte de forte inflation revient à leur donner moins quand elles vont donner plus !

 

Sur l'habitat, qui est le grand dossier de cette session à travers l'adoption des « Orientations pour une stratégie départementale de l'habitat », Rozenn Métayer en détaillera l'analyse que nous en faisons. Mais commençons par indiquer qu'au vu de la crise du logement qui sévit sur une grande partie du territoire, c'est une bonne nouvelle que le département ait une stratégie claire sur cette question. Nous en distinguerons les points positifs, car il y en a un bon nombre, mais je souhaitais souligner à ce stade deux écueils qui nous semblent majeurs dans cette stratégie.

 

Le premier, c'est de rappeler que le Département du Morbihan a été le dernier département breton à être délégataire des aides à la pierre en 2009, mais aussi l'un des premiers à rendre la délégation à l'État en 2014.

Dans ce schéma stratégique, vous nous expliquez que vous allez construire du réseau, réunir les acteurs, mais tout cela existe : ça s'appelle le Comité Régional de l'Habitat et de l'Hébergement, ou encore le Club Décentralisation et Habitat. Cela fait presque 20 ans que les collectivités se saisissent du sujet du logement et de l'habitat en Bretagne, expérimentent collectivement et négocient avec l'État leurs moyens (certes de plus en plus remis en question au fil des gouvernements), mais évidemment sans cette casquette de délégataire, le département du Morbihan n'aura pas voix au chapitre comme une collectivité qui s'implique vraiment sur la politique habitat et logement.

 

Le second point concerne la place de Morbihan Habitat dans cette stratégie. Faire en sorte que Morbihan Habitat soit le seul opérateur à bénéficier des garanties d'emprunts ou faire qu'il porte l'office solidaire du Morbihan pose question. La situation de monopole poussée à l'excès rend captifs nos Maires et interroge. Vous semblez aussi considérer comme inéluctable que les communes s'impliquent financièrement quand ce sont les EPCI qui sont compétents à travers le PLH et donc doivent être financièrement impliqués et que le Conseil départemental apportera 5 millions d'euros annuels de titre participatif à Morbihan Habitat.

 

Vous l'avez compris, nous sommes inquiets de la place que vous réservez aux maires dans votre stratégie, face à un opérateur quasi unique qui peut alors se retrouver en situation d'imposer ses choix plutôt que de suivre les désirs des élus des territoires.

 

Nous vous le disons d'autant plus facilement que nous avons des remontées de maires subissant la vente des logements sociaux dans leur commune, alors qu'ils sont contre et où il existe toujours une demande de logement accessible.

 

A propos du rapport de la Chambre régionale des comptes sur les collèges. Là aussi nous en avons fait une lecture attentive et Alain Caris en détaillera notre analyse, notre attention principale porte sur l'enjeu de mixité sociale.

Dernier point, nous souhaitions évoquer de nouveau ici les centres sociaux. Au mois de juin, à l’initiative des 4 conseillers départementaux de Lorient, une rencontre s’était tenue, en votre présence, entre les présidents et directeurs des 5 centres lorientais et la Présidente de la Fédération des centres sociaux de Bretagne.

Je crois que, comme nous, vous avez pu mesurer l'importance du travail réalisé par ce réseau, l'importance en termes de lien social. C’est un vrai acteur du aller vers, une notion souvent évoquée mais dont la mise en œuvre n'est pas toujours si évidente. Nous avons là un réseau, connu par les acteurs et habitants des quartiers et territoires où ils sont situés. Ces centres sociaux n'existent pas que dans les zones urbaines, à l'instar des centres sociaux intercommunaux de Questembert.

 

Les centres sociaux jouent un rôle de rempart contre le délitement social. Il nous faut sécuriser leur avenir financier, leur donner de lisibilité, aider à l'émergence dans des territoires où il serait nécessaire qu'ils puissent exister.

Nos voisins bretons fonctionnent avec des conventionnements, le Morbihan en la matière est absent de cet accompagnement, pouvons-nous y travailler ?

Damien GIRARD - Président du groupe de Gauche et Écologiste